La Femme passe en premier, Romans
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Chapitre 41 – Xiao Hei

Traduction française par Tian Wangzi

Le campement était extrêmement calme, la nuit, et même les soldats en patrouille parlaient peu, alors les sons des trois généraux dans la tente du milieu qui discutaient et se battaient étaient particulièrement clairs. Les trois hommes l’avaient accompagné contre les Xiongnu, et ils étaient habitués à la vie dans le désert, alors maintenant, en banlieue de la capitale, ils ne savaient pas comment se restreindre. Jing Shao se dit qu’il allait devoir passer derrière eux au retour, mais il secoua la tête et s’éloigna lentement de leur tente.

L’attaque sur le fief du sud-ouest était maintenant trois ans plus tôt que dans sa vie précédente, et son avantage était évident. Maintenant, le général Zhengdong, qui le confrontait toujours, avait été envoyé en support au grand prince, et son père l’empereur ne lui avait pas envoyé d’autres personnes pour diriger avec lui, alors il avait une bien plus grande marge de manœuvre. Seulement sur le coup, c’est plutôt chaotique, et il ne savait pas par où commencer.

*hennissement* En voyant approcher son maître, Xiao Hei, qui mâchait de l’herbe dans l’écurie, s’approcha pour le saluer.

Jing Shao reprit ses esprits. Inconsciemment, il était venu jusqu’à l’écurie et se tenait devant la mangeoire de Xiao Hei. Il caressa cette grosse tête noire qui se fondait rapidement avec l’obscurité grandissante.

Xiao Hei secoua la tête, insatisfait, et se tourna sur le côté pour continuer à mâcher son herbe.

Il avait déjà été poussé hors de sa tente par sa WangFei, comment son cheval pouvait-il aussi lui tourner le dos? Jing Shao pinça l’oreille de Xiao Hei : « Tu n’as pas le droit de manger. Je n’ai nulle part où dormir, alors tu n’as pas le droit à une collation! »

Xiao Hei leva la tête, et tout en mâchonnant son herbe, il regarda son maître de ses grands yeux noirs. Comme il était le cheval chéri de WangYe, les garçons d’écurie lui préparaient toujours pour lui seul de l’herbe fraîche tous les jours, bien meilleure que le foin sec que les autres chevaux mangeaient.

Xiao Hei s’était depuis longtemps habitué à ce que Jing Shao lui pince les oreilles de temps à autre, alors il continua à mâchonner son herbe sans s’arrêter.

Jing Shao et Xiao Hei se dévisagèrent un moment, mais il est impossible pour un cheval et un homme de se regarder dans les yeux, alors ils abandonnèrent. Attrapant le pilier, Jing Shao s’assit sur la barrière. Il tira un brin d’herbe qu’il se mit à la bouche. L’herbe était légèrement amère, seule la partie blanche était douce, alors il ne comprenait pas comment Xiao Hei pouvait manger avec autant d’enthousiasme.

« Xiao Hei, attends que la guerre soit finie, je vais te trouver une épouse. » Jing Shao leva la tête pour regarder la lune brillante dans le ciel. En banlieue de la capitale, la lune semblait particulièrement froide. Dans sa vie précédente, il n’avait jamais eu de moments paisibles comme celui-ci pour admirer la lune, il ne faisait que penser au placement des troupes, à s’entraîner, ou à s’emparer du trône. Il avait vécu jusqu’à 30 ans, et il était déjà complètement épuisé, et pourtant, ça n’en avait pas valu la peine. Il donna à manger à Xiao Hei l’herbe qu’il avait à la main : « Tu veux un époux ou une épouse? »

*hennissement* Xiao Hei regarda le pauvre brin d’herbe solitaire dans la main de son maître et souffla fortement par ses narines, avant de se détourner pour aller dormir.

Jing Shao, complètement dédaigné par son cheval, dut retourner sur la pointe des pieds à la tente royale. L’homme sur le lit dormait sur le côté, une main à l’extérieur de la couverture en brocart, profondément endormi. Il semblait avoir changé ses vêtements après le départ de Jing Shao.

Jing Shao retira en silence ses robes externes et souleva un coin de la couverture pour s’y glisser.

Mu HanZhang s’agita, mais comme il était habitué à la présence de Jing Shao à ses côtés, il ne se réveilla pas.

Jing Shao pinça les lèvres, et avec précaution, il prit le bras à l’extérieur de la couverture pour le recouvrir, et lentement, il tenta de glisser ses propres bras pour prendre l’homme contre lui.

« Hm… » L’homme dans ses bras grogna légèrement. Jing Shao sursauta. Il se figea un instant pour voir s’il s’était réveillé, et ce n’est qu’une fois rassuré qu’il remonta la couverture, et se contenta d’enfouir son visage dans le cou de sa WangFei. Il inspira profondément la douce fragrance de Jun Qing, et en le caressant légèrement, il ferma ses beaux yeux.

Jing Shao était resté de son côté du lit, alors il n’avait pas remarqué que l’homme dans ses bras avait étiré ses lèvres en un léger sourire.

Tôt le lendemain, comme Mu HanZhang avait dormi longtemps, il se réveilla de bonne heure. Le soleil brillait sur la tente blanche, les motifs bien visibles. Il resta perplexe un moment avant de se rappeler qu’il n’était plus au manoir du prince, mais au campement militaire. L’homme à côté dormait encore profondément, ronflant d’un air satisfait, son souffle chaud contre son cou. Il soufflait sur quelques mèches de cheveux lousses qui le démangeaient un peu.

Mu HanZhang s’agita et se tourna pour faire face à Jing Shao et regarder son visage endormi. Il avait cru qu’ils allaient être séparés pendant quelques mois, voir quelques années, et ça aurait été mentir de dire qu’il n’était pas triste. Il avait même fait des plans, se disant que s’il ne revenait pas après quelques années, il allait lui-même partir faire des affaires près des champs de bataille. Il ne s’était pas attendu à ce que ce type ait ses plans à lui.

Il étira ses longs doigts élancés pour tapoter le pont du nez droit de Jing Shao. Mu HanZhang ne put s’empêcher d’attendrir son regard. Il n’était déjà plus fâché des petites manigances de mauvais goût de Jing Shao, seulement, il ne pouvait pas s’habituer à ce problème.

Sentant que son nez lui démangeait, Jing Shao ouvrit des yeux confus, et en voyant le doigt aussi lustré que le jade, il ouvrit la bouche pour le mordre et lécher le bout de ce doigt rond.

Mu HanZhang retira sa main et regarda tranquillement Jing Shao ouvrir complètement les yeux.

« Hé hé, Jun Qing, tu es réveillé. » Jing Shao avait choisi d’oublier sa punition de dormir avec le général dur et puant. Il se pencha et posa un baiser sur les douces lèvres de sa WangFei : « Il est encore tôt. Je vais aller m’entraîner. Attends mon retour des exercices matinaux, et on déjeunera ensemble. »

Sans attendre la réplique de l’homme dans ses bras, Jing Shao sauta sur ses pieds pour changer ses vêtements et se laver le visage avant de partir en coup de vent.

Mu HanZhang se redressa lentement. En regardant Jing Shao qui semblait prendre la fuite, il ne put s’empêcher de rire doucement.

Il se tourna et se retourna, mais ne retrouvant pas le sommeil, Mu HanZhang se leva pour s’habiller. Dans la tente royale se trouvait une délicate boîte en bois qui avait été déchargée du carrosse la veille. Elle contenait les vêtements et les objets qu’il utilisait quotidiennement. On dirait bien que Jing Shao s’était vraiment bien préparé à l’avance.

« Gongzi, vous êtes levé. » Yun Song entra avec une jarre d’eau, et en voyant que Mu HanZhang était déjà habillé, il s’empressa de verser de l’eau pour qu’il puisse se laver le visage. À l’extérieur, il n’était pas approprié de l’appeler WangFei, et comme il n’était pas un militaire, il ne pouvait pas non plus l’appeler Junshi, alors il lui donna le titre de Gongzi.

« Tu viens aussi en campagne? » Mu HanZhang prit la serviette que lui tendait Yun Song pour s’essuyer le visage. Habituellement, les serviteurs du manoir comme Yun Song ne pouvaient pas suivre à l’extérieur.

« Cet humble serviteur reste seulement deux semaines au campement pour assister WangYe et Gongzi, puis je rentrerai au manoir lors du grand départ, » dit Yun Song en souriant. « Hier soir, Yun Zhu a fait une crise pour vous suivre, mais WangYe le lui a refusé. »

« Tu es familier avec le campement militaire? » Mu HanZhang hocha légèrement la tête et prit une gorgée de la tasse de thé qu’on lui tendait.

« Ce campement militaire est celui de l’armée personnelle de WangYe, j’y suis venu quelques fois, » répondit Yun Song, toujours en souriant.

En l’écoutant, Mu HanZhang fronça légèrement les sourcils. Il leva la main pour ouvrir la toile, et la forte odeur de la terre se leva à ses narines, lui remontant le moral : « Dans ce cas, tu peux m’accompagner faire le tour du campement. »

À cette heure-ci, presque tous les soldats étaient sur les terrains d’entraînement, il n’y avait que quelques soldats qui s’affairaient à diverses tâches, comme retirer les bassins de fer dans lesquels les feux avaient déjà été éteints, émettant des filets de fumée pâle.

Selon Yun Song, il y avait environ 5 000 soldats dans ce campement, et tous les soldats et les chevaux appartenaient à Jing Shao. Habituellement, ils ne restaient pas ici, mais à une centaine de li à l’extérieur de Qixian. Ces gens étaient la division d’élite que Jing Shao avait formée en affrontant les Xiongnu. Lorsqu’ils étaient revenus du nord-ouest et que l’armée avait été dissolue, l’empereur avait été particulièrement généreux en octroyant ces 5 000 hommes et de larges terres à Qixian à Cheng Wang.

En parlant de Qixian, Mu HanZhang se souvint que Jing Shao voulait lui échanger 100 mu de terres fertiles contre sa forêt désolée. Selon les gens qui étaient allés voir, ces terres à Zhuangzi étaient vraiment bonnes et fertiles, et il y avait même des familles de soldats pour aider à les cultiver. Alors c’était là que se trouvait le campement militaire de Jing Shao, habituellement.

« Wang’er-ge, pourquoi le porridge devient de plus en plus mince? » Deux petits soldats transportaient en soufflant un gros baril de bois qu’ils posèrent dans un espace dégagé au milieu du campement.

« Il y a aussi des pains vapeur, non? De la soupe, c’est bien suffisant. » Le dénommé Wang’er-ge transportait un large panier qu’il posa à côté du baril de bois.

Mu HanZhang s’approcha pour regarder avec curiosité. Les trois hommes le regardèrent étrangement et s’échangèrent des regards. Le mot s’était répandu la veille que WangYe avait emmené un extrêmement beau conseiller militaire, et qu’ils avaient dormi dans la même tente. Inutile de dire que l’homme en question, ce devait être lui.

« Junshi, vous êtes levé de bonne heure. » En voyant le serviteur de WangYe à ses côtés, il était difficile de prétendre ne pas les avoir vus, alors Wang’er les salua.

Mu HanZhang hocha légèrement la tête et demanda d’une voix chaleureuse : « C’est le genre de déjeuner qui est servi tous les matins? Pourquoi n’y a-t-il pas de légumes? » Puisque Jing Shao lui avait conféré le rang de conseiller militaire, il avait une position haut placée, un peu comme un stratège. Seulement, sa position n’était pas officielle, alors il ne pouvait pas trop se donner d’air devant ces soldats.

« Ah, tant qu’on peut manger à notre faim. Un soldat ne peut pas se soucier de légumes. » Les deux soldats derrière Wang’er s’échangèrent un regard entendu. « Je dois encore m’occuper du repas. Je dois vous laisser, Junshi. »

Le petit soldat qui portait le chaudron voulait dire quelque chose, mais devant le conseiller militaire propre et bien habillé, par embarras, il frotta ses mains sur son tablier et suivit immédiatement Wang’er.

« Wang’er-ge, tu disais que ce conseiller militaire était beau. Est-ce que c’est vrai, ce qu’on dit, qu’il est l’amant de WangYe… »

« Chut… ne raconte pas n’importe quoi en plein jour. » Wang’er s’empressa de faire taire le petit soldat.

Lorsque Mu HanZhang rentra à la tente royale, Jing Shao avait déjà pris un bain et l’attendait assis devant le déjeuner. Le déjeuner de WangYe n’était pas bien plus riche que celui des soldats, mais il avait aussi un plat de légumes sautés et un plat d’arachides.

En voyant les sourcils légèrement froncés de Mu HanZhang, Jing Shao se souvint que Jun Qing n’était pas habitué à ce genre de repas, et il dit un peu pour s’excuser : « La vie au campement militaire est plus dure. Si la nourriture ne te plaît pas, je peux demander à un cuisinier du manoir de nous suivre… »

« Tu devrais manger avec les généraux et les soldats. » Mu HanZhang s’assied à table et prit le bol de riz. « Je suis seulement surpris. Le Ministère du Revenu ne t’a pas alloué un budget inférieur pour la campagne, pourquoi les repas sont si pauvres au campement? »

« Le budget? » Jing Shao prit une bouchée de pain vapeur. « Il y a beaucoup de monde dans l’armée, le budget ne permet que cette frugalité. »

Craignant de se mordre la langue s’il parlait en mangeant, Mu HanZhang pinça les lèvres et n’ajouta rien, mais intérieurement, il se dit que dans les deux prochains jours, il allait vérifier les comptes de l’armée. Il allait d’abord s’assurer que les soldats mangent bien, puis, si quelqu’un détournait des fonds du budget militaire, il y aurait des ennuis si quelqu’un du Ministère du Revenu ouvrait les comptes pour en faire la vérification.


« WangYe! WangYe, il y a un problème! » Un petit soldat arriva soudainement en criant à l’extérieur de la tente royale. « On dirait que Xiao Hei est malade! »

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