La Femme passe en premier, Romans
Laisser un commentaire

Chapitre 78 – Combattre le mal par le mal

Traduction française par Tian Wangzi

Bei WeiHou avait été clair. Il fit claquer ses manches en partant, puis se rendit auprès de la seconde épouse Qiu Shi. Il avait appris aujourd’hui que Qiu Shi était enceinte, et il n’était toujours pas allé la voir. Il n’était plus tout jeune, si l’enfant pouvait naître en santé, il pourrait s’en vanter devant les hommes de Ding NanHou. En y pensant, l’humeur maussade de Mu Jin s’améliora soudainement.

La dame Bei WeiHou passa la nuit debout, repensant à tout ce qui s’était passé depuis le début.

D’abord, Mu HanZhang avait les faveurs de Cheng Wang, il avait obtenu du mérite militaire, l’empereur avait fait ses éloges et il avait accepté de lui remettre le titre de noblesse Hou.

Ensuite, si Mu HanZhang obtenait le titre de Hou, ça causerait la mort de Mu LingBao qui ne pourrait pas hériter du titre.

Mais la dame Yong ChangBo causait un tel chaos, si l’empereur décidait de ne pas lui remettre le titre, il pourrait profiter de l’occasion pour annoncer la nouvelle que le fils noble de Bei WeiHou était handicapé, et donc il pourrait remettre le titre de noblesse directement à Mu HanZhang, et tout ce qu’elle aura fait n’aura servi à rien.

Alors, il était impératif de lui permettre de recevoir le titre de Hou, afin qu’il ne prenne pas la place qui revenait à son petit-fils. Ce sale con s’en tirait vraiment trop facilement!

Après avoir pris sa décision, la dame Bei WeiHou s’étendit pour se reposer pendant deux shichen. Le lendemain à la première heure, elle fit sa toilette et demanda à entrer au palais.

La cour était un peu longue ce matin-là parce que l’empereur voulait rappeler le grand prince afin de lui éviter la disgrâce devant les barbares du sud. Naturellement, les officiers de la faction de Jing Yu acceptèrent. Maintenant que Cheng Wang était rentré, il était clair que le grand prince gaspillait ses forces à Diancang et qu’il n’arriverait pas à obtenir du mérite militaire. Il valait mieux qu’il rentre au plus vite, comme ça, le quatrième prince aurait aussi du soutien.

« Le terrain de Diancang est complexe, et le grand prince n’a jamais dirigé de troupe avant, alors il est normal qu’il perde un peu de temps. » Le ministre de la Guerre Sun s’avança. Ses mots impliquaient que le grand prince n’avait jamais fait la guerre, comment aurait-il pu gagner en seulement six mois? Il n’était pas comme Cheng Wang qui avait pacifié deux fiefs en quatre mois, qui était un rare talent qu’on ne voyait qu’une fois tous les 100 ans. Ouvertement, ses mots semblaient soutenir le grand prince, mais en fait, il faisait les éloges de Jing Shao.

« C’est vrai, Majesté, apaiser le chaos ne se fait pas en une bataille. Si on lui laisse du temps, il pourrait y arriver, » ajouta un autre officier.

Jing Shao savait que ces officiers étaient les hommes de son grand frère, et leur but était de freiner le retour du grand prince à la cour. Jing Rong et Jing Yu se réservaient les choses qui pouvaient rapporter le plus de bénéfices, et s’ils ne pouvaient pas se les approprier, ils ne les laissaient pas sans se battre, ça n’allait pas. De plus, si le grand prince revenait à la cour, la responsabilité de la pacification des barbares du sud allait lui revenir.


« Jing Shao, qu’est-ce que tu en penses? » L’empereur Hong Zheng regarda Jing Shao qui gardait la tête baissée sans dire un mot. En ce qui a trait à la guerre, il allait sans dire qu’il fallait maintenant demander l’avis de Jing Shao.

« Une guerre ne se gagne pas du jour au lendemain. Les barbares du sud sont rusés, le terrain de Diancang est difficile, il lui faudra du temps pour en percevoir les mystères. » Jing Shao s’inclina. « Cet humble fils croit que le grand prince fait déjà de son mieux. Seulement peu de temps s’est encore écoulé, les effets ne sont pas encore apparents, il vaut mieux lui laisser encore du temps. »

L’empereur Hong Zheng le regarda d’un regard profond : « Si tu y allais, en combien de temps pourrais-tu éliminer les barbares du sud? »

Jing Shao réfléchit un instant, choisissant bien ses mots : « C’est par chance si cet humble fils a réussi à pacifier les deux fiefs aussi vite. Le grand prince est accompagné du général ZhengDong, cette fois. Même si cet humble fils y allait, je ne pourrais pas faire mieux que ces deux hommes. »

L’empereur Hong Zheng hocha légèrement la tête. Il avait confiance en Jing Shao. Après tout, Jing Shao avait déjà avoué qu’il n’aurait pas pu vaincre le sud-est par lui-même, c’était seulement le roi du sud-est qui avait été malchanceux et avait été assassiné par une de ses concubines. Même s’il savait que Jing Shao parlait ainsi par lâcheté puisqu’il n’avait pas envie de retourner à la guerre, il avait toujours défendu son grand frère et il n’avait pas de mauvaises intentions. L’empereur Hong Zheng hocha la tête avec satisfaction.

Ainsi, le retour à la capitale du grand prince fut encore repoussé. L’expression du quatrième prince était un peu laide, Jing Chen avait toujours le même air d’impassibilité même si le mont Tai s’effondrait devant lui. Il échangea un regard avec Jing Shao, puis prit quelques propositions de titres de noblesse préparés par le ministère des Rites et se rendit au bureau impérial.

Après avoir quitté la cour matinale, Jing Shao se rendit à la porte latérale, où il rencontra le dirigeant des gardes, Xiao Qian.

« WangYe, j’ai des nouvelles. » Xiao Qian tira Jing Shao pour se cacher dans le cadre d’une petite porte.

Jing Shao lui donna une petite tortue dorée : « Parle. »

« Hé hé, la dame Bei WeiHou est rentrée au palais tôt ce matin. » Xiao Qian rangea la petite tortue dorée dans ses vêtements et dit à voix basse : « Cette dame est vraiment incroyable. J’ai demandé au petit eunuque du palais Yongning de s’informer, et la dame Yong ChangBo a failli mourir de colère. »

En fait, la dame Yong ChangBo était retournée se plaindre en pleurant au palais Yongning après le déjeuner, répétant encore et encore que Yong ChangBo était loyal depuis des années, et que maintenant il était tombé au point d’être intimidé. Il avait risqué sa vie pour le grand fondateur, et maintenant un jeune à peine adulte allait recevoir un titre de noblesse. Comment les familles nobles pouvaient-elles accepter ça?

La dame Bei WeiHou s’était rendue aussi au palais, et sans dire un mot elle se mit à pleurer, pleurant encore plus fort que la dame Yong ChangBo. Elle disait que le fils de la famille Mao GuoGong avait poussé le fils de Bei WeiHou dans l’eau lors des jours les plus froids de l’année, qu’il était encore malade, et que de ses deux neveux, un était encore alité, et l’autre avait de graves engelures aux jambes. La famille Bei WeiHou avait toujours été loyale, seulement leur titre de noblesse était un peu plus bas que les autres, et maintenant ils étaient tombés au point de se faire intimider. À l’époque, ils avaient risqué leur vie à se battre pour le grand fondateur, et maintenant il ne leur restait qu’un petit-fils avant d’être complètement éliminés.


Yong ChangBo était surprise. Elle sentait que ce qu’elle disait lui semblait familier, mais la famille Mao GuoGong était maintenant alliée avec sa famille, alors naturellement elle devait les soutenir, donc elle lui demanda ce qui lui faisait croire que la famille Mao GuoGong était responsable.

La dame Bei WeiHou l’ignora et continua à pleurer, disant que l’impératrice avait promis un bon mariage à sa fille, mais que maintenant elle allait devenir une vieille fille puisque le mariage n’avait pas eu lieu. Elle ajouta aussi que le petit-fils de Yong ChangBo avait gâché ses herbes médicinales la dernière fois. Elle avait mis trois ans à faire pousser ces herbes pour soigner sa belle-mère, mais maintenant elles étaient gâchées, l’état de sa belle-mère empirait de jour en jour, et la famille Yong ChangBo ne s’était même pas excusée.

En l’écoutant, la dame Yong ChangBo faillit perdre son souffle. Son petit-fils avait coupé quelques branches de chèvrefeuille la dernière fois. Était-il possible que le manoir Bei WeiHou manque d’argent au point de ne pas pouvoir acheter un médicament pour soulager la chaleur interne?

Jing Shao ne put s’empêcher d’éclater de rire en l’écoutant.

Xiao Qian ne pouvait pas non plus cacher sa joie : « C’était agité au palais Yongning, aujourd’hui. Quelques dames venant faire leurs salutations ont aussi vu la scène, et elles se sont empressées de se retirer en riant. »

« Qu’a dit l’impératrice douairière? » Intérieurement, Jing Shao se dit que la dame Bei WeiHou était vraiment impressionnante pour faire porter le blâme sur ces deux familles. Le jeune gongzi de la famille Mao GuoGong s’était vraiment disputé avec Mu LingBao, il avait vu les deux hommes se disputer durant l’été au restaurant Huiwei. Seulement, la famille Mao GuoGong n’avait rien à voir avec sa chute dans l’eau.

« Enragée par la dispute des deux dames, l’impératrice douairière les a fait jeter hors du palais, disant qu’elle ne voulait plus rien entendre de cette histoire. » Xiao Qian sourit. Un tel chaos, les deux femmes allaient faire parler d’elles à la capitale.

Jing Shao sourit en remerciant Xiao Qian pour son aide. Il remonta sur Xiao Hei pour rentrer à la maison, pressé de raconter cette nouvelle à sa WangFei.

« WangYe! » Assis dans un palanquin, le ministre Sun aperçut par sa fenêtre Jing Shao sur son cheval, et s’empressa de l’appeler.

*hennissement* Xiao Hei s’arrêta immédiatement, il se redressa en brandissant ses sabots en l’air, puis recula de quelques pas.

« Qu’y a-t-il? » Jing Shao fronça les sourcils. Il voulait rentrer vite pour prendre le déjeuner avec sa WangFei, Jun Qing avait dit qu’il lui ferait lui-même des boulettes de viande frites, aujourd’hui!

« Le ministère de la Guerre a des affaires sur lesquelles WangYe doit prendre une décision, aujourd’hui, vous devriez y aller. » Le ministre Sun parla avec impuissance. Ce seigneur négligeait souvent son travail avant, et maintenant qu’il était de retour de la guerre, il n’était pas venu une seule fois au ministère de la Guerre.

« Je sais. » Jing Shao agita la main. Aujourd’hui, son grand frère lui avait déjà tout expliqué. Récemment, il devait trouver un prétexte pour faire tomber cette vieille marionnette de Song An, alors on pouvait estimer que le ministre Sun voulait le consulter à ce sujet.

« Jun Qing, je suis rentré! » cria Jing Shao avec enthousiasme dès qu’il mit le pied au jardin est.

Mu HanZhang s’empressa d’appliquer de l’onguent sur ses mains, puis se retourna pour l’accueillir.

« Alors, les boulettes? » Jing Shao enlaça avec bonheur sa WangFei. Il portait encore sur lui l’odeur de la nourriture, très alléchante, et il ne put s’empêcher d’inspirer profondément dans le creux de son cou pâle.

Chatouillé, Mu HanZhang le repoussa doucement pour lui pointer l’assiette sur la table.

Plusieurs mets fins étaient posés sur la table, toutes dans des assiettes de porcelaine blanche, sauf un plat au centre de la table dans une assiette en bois, remplit de boulettes de viande frites bien dorées. Il y avait aussi un bol en céladon sur le côté, dans lequel se trouvait de la sauce à l’ail.

Sans même prendre le temps de s’asseoir, Jing Shao prit une boulette avec ses baguettes, la trempa dans la sauce et prit une bouchée. Croustillant et savoureux, il ne put s’empêcher d’en vouloir plus, alors il prit une autre bouchée. Il dit avec ambiguïté : « Jun Qing, tu es trop génial, même sans cuisiner, tu peux faire quelque chose d’aussi délicieux! »

Avec impuissance, Mu HanZhang le força à s’asseoir et lui servit un bol de riz. Tôt le matin, Jing Shao avait refusé de sortir du lit avant de partager un moment intime avec lui, et ultimement, il avait dû lui promettre de lui cuisiner des boulettes de viande pour le convaincre de sortir du lit.

« Ce n’est pas comme si je les avais cuisinées. La cheffe a tout fait, je n’ai fait que les former et les faire frire. » Mu HanZhang posa sa main gauche sur sa cuisse et mangea uniquement avec sa main droite.

« C’est déjà incroyable! » Jing Shao prit une autre boulette qu’il tendit à l’homme à ses côtés.

Mu HanZhang commença par refuser, mais il n’eut pas d’autre choix que de manger la moitié de la boulette. Seulement, avant qu’il puisse manger l’autre moitié, les baguettes s’étaient déjà éloignées de lui, et la boulette termina dans la bouche de Jing Shao. En le voyant manger avec un tel naturel, Mu HanZhang ne pouvait rien dire. Il pinça seulement les lèvres en mangeant lentement son riz.

Jing Shao étira la main pour attraper cette main qui restait obstinément sous la table. Quand Mu HanZhang étouffa un grognement et tenta de se dégager, Jing Shao sentit son cœur se serrer. Il raffermit sa prise sur son poignet et le força à lever la main, exposant les brûlures sur ses doigts.

« Jun Qing… » Jing Shao fronça les sourcils, souffrant énormément pour lui. Tout le bonheur qu’il avait eu en mangeant les boulettes s’évanouit en un instant.

« Ce n’est rien, dans deux jours, ce sera guéri. » Mu HanZhang soupira. Un gentilhomme se tient loin de la cuisine. Depuis qu’il était tout petit, il n’avait jamais mis les pieds en cuisine. Mais en regardant la cheffe, ça avait semblé si facile qu’il s’était dit qu’il pouvait le faire lui-même. Seulement, il était maladroit.

« À l’avenir, tu n’as plus le droit de retourner en cuisine. » Jing Shao envoya quelqu’un chercher de l’eau glacée, y trempa un mouchoir de soie, et l’appliqua délicatement sur les ampoules.

Le toucher glacial apaisa la douleur de la brûlure. Mu HanZhang regarda Jing Shao appliqué de l’onguent avec soin, avant de souffler doucement sur sa brûlure. Il avait l’air si sérieux, un peu comme quand il étudiait la disposition des troupes. Il étira lentement les lèvres, sentant son cœur se réchauffer, et il se dit que ses brûlures en avaient valu la peine.

« Ne sors pas ces deux prochains jours, si tu ne fais pas attention, ça pourrait laisser des marques. » Jing Shao serra cette main lustrée comme le jade, souffrant énormément pour lui.

« Arrivé d’un édit impérial! » Alors que les deux hommes discutaient, une annonce retentit à l’extérieur. Ils s’échangèrent un regard. Mu HanZhang demanda à Duo Fu d’accueillir l’eunuque, alors qu’il tirait Jing Shao pour l’aider à se changer. Ils se dirigèrent ensuite au jardin à l’avant pour recevoir l’édit impérial.

« Cheng WangFei Mu HanZhang, recevez l’édit impérial! » L’eunuque lança un regard aux époux Cheng Wang, agenouillés au sol, puis déroula le rouleau de soie doré brodé de dragons.

Laisser un commentaire